La méthode Montessori en classe de maternelle
La maternelle constitue le maillon le plus représentatif de la pédagogie Montessori. Maria Montessori, inspiratrice de la philosophie qui porte son nom, a d'abord « testé » sa méthode dans un hôpital psychiatrique pour enfants souffrant de divers troubles cognitifs. Forte de ses résultats encourageants, elle sera par la suite invitée à mettre sa carrière de médecin en suspens pour s'occuper d'enfants défavorisés dans la capitale italienne.
Ce sera la fameuse « Casa dei bambini », un genre de laboratoire qui lui permettra de peaufiner la pédagogie Montessori pour la maternelle et ensuite la diffuser dans le monde entier. Aujourd'hui, c'est en maternelle que la philosophie Montessori est la plus présente.
En maternelle, l'enfant est son propre constructeur
Par sa capacité d'absorber les enseignements de son environnement, l'enfant va apprendre de ses propres expériences, par ses propres moyens pour construire sa personnalité à son rythme, en fonction de ce que lui offre et ce que lui refuse son milieu. Parce que chaque enfant a ses propres aspirations, ses propres difficultés et sa propre palette de talents, la démarche qui consiste à lui imposer un cheminement balisé sans aucune marge de manœuvre devient vite contreproductive.
Dans une ambiance Montessori qui compte 15 enfants âgés de 3 à 6 ans, comment recourir à une méthode unique et normalisée pour tous sans exclure une partie des jeunes élèves ? La méthode Montessori a fait couler beaucoup d'encre ces dernières années. Elle s'est progressivement imposée comme la pédagogie alternative la plus célèbre en France et en Europe. Aujourd'hui, l'Hexagone compte environ 200 maternelles qui appliquent la méthode Montessori, qu'elles soient agréées ou non par l'Association Montessori Internationale.
Depuis une dizaine de mois, le ministère de l'Education nationale ne cache plus son vif intérêt pour la philosophie chère à Maria Montessori. En effet, à l'occasion des Assises de l'Ecole Maternelle, le ministre de l'Education national, Jean-Michel Blanquer, s'est entretenu avec le neuropsychiatre Boris Cyrulnik dans l'objectif de discuter des soubassements théoriques et pratiques des différentes méthodes d'enseignement alternatives qui pourraient concourir à l'amélioration de l'apprentissage des enfants dans les petites sections.
Plus tôt dans l'année, le même ministre s'était montré réceptif à l'introduction d'éléments inspirés de la méthode Montessori, une pédagogie qu'il a assuré « bien connaître » à l'occasion de sa réunion avec les représentants de l'Association Montessori Internationale (AMI).
A quoi ressemble le quotidien d'un jeune montessorien en maternelle ?
Le principe structurant du quotidien du jeune montessorien est le suivant : « aide-moi à faire seul ». A partir de là , tout un arsenal pédagogie est déployé pour accompagner l'enfant dans son développement sensoriel et cognitif et dans son apprentissage selon un rythme qui lui est propre, dans un environnement bienveillant et en phase avec les préceptes de Maria Montessori. « Les élèves arrivent à 8h50 et choisissent eux-mêmes le travail qu'ils vont accomplir », explique Laurent Levy, directeur de l'école The Bilingual Montessori School of Paris dans le 16e arrondissement.
Ici, c'est l'enfant qui se sert dans les étagères, qui choisit ce qui lui convient et qui crée de son propre chef, sous la supervision discrète mais avertie d'un éducateur formé à la méthode. La classe est une ruche pleine d'abeilles, chacune vaquant à ses occupations. L'enfant travaille, manipule le matériel Montessori, déroule son tapis s'il le souhaite et range les objets utilisés dans leur place dédiée quand bon lui semble.
Il va toucher des lettres rugueuses pour en mémoriser la forme et les nuances, il va passer en revue différentes étoffes pour en saisir la texture, il va travailler son vocabulaire avec le jeu de reconnaissance des images et des illustrations. Chaque jour est un pas de plus vers l'école élémentaire.
La méthode Montessori se distingue de l'enseignement classique à plusieurs niveaux, mais c'est le système d'évaluation qui surprend le plus les parents non-initiés. En effet, les jeunes montessoriens ne sont jamais notés. Il n'y pour ainsi dire aucun système d'évaluation, si ce n'est l'œil averti de l'éducateur qui observe discrètement et qui quantifie les progrès réalisés par chaque enfant. Un petit cahier va documenter les créations de chaque enfant pour éviter les redondances. L'enfant apprend dès son plus jeune âge qu'il travaille pour lui-même, pas pour une note. Ce raccourci lui évite toute éventuelle démotivation par la suite, car il ne peut y avoir démotivation si le dessein ultime est l'épanouissement.
L'autre avantage de la maternelle Montessori réside dans ses frontières poreuses et floues, notamment à l'égard des parents. « L'école est une association à but non lucratif, elle est donc autogérée par les parents », résume Laurent Levy. Les parents qui le souhaitent sont impliqués dans les enseignements à travers des ateliers réguliers où ils viennent parler de leur métier, de leurs passions ou de leurs expériences aux enfants. Les parents sont également appelés à participer aux sorties et aux voyages dans le cycle 3 - 6 ans, mais leur rôle est amené à se minimiser à mesure que l'enfant grandit, jusqu'au fameux internat 5 jours sur 7 une fois au lycée Montessori. Comme dans la crèche, la classe de la Maison des Enfants est aménagée dans la perspective d'une utilisation autonome et sécurisée. L'enfant doit pouvoir se déplacer et manier chaque objet sans l'intervention d'un adulte. Cet aménagement sur-mesure est une invitation à la découverte, à l'exploration et à l'expérimentation dans une logique d'évolution progressive. Ainsi, l'enfant s'approche chaque jour un peu plus de la maîtrise consciente de sa personne.
Je suis enseignant(e) en maternelle : puis-je appliquer la méthode Montessori ?
L'Education nationale est une institution avec des programmes. Elle garantit la liberté pédagogique des enseignants dans un certain cadre défini par le ministère de l'Education. La pédagogie Montessori, comme toutes les autres pédagogies alternatives, est une méthode qui doit être examinée lorsqu'elle est mobilisée à l'école maternelle classique. Elle reste un moyen parmi d'autres pour atteindre les objectifs fixés par les programmes de l'Education nationale.
Dans tous les cas, l'éducateur doit respecter les demandes institutionnelles. Sont concernés : les programmes par cycles, les affichages obligatoires (progressions, livres lus, comptines et chants, emploi du temps, PPMS, plan d'évacuation, etc.), les documents de préparation de la classe, le livret d'appel ainsi que les outils d'information des parents (carnet de suivi des apprentissages, au minimum), quand bien même ces formalités seraient perçues par l'éducateur comme étant incompatibles avec la méthode Montessori. Pour être en bons termes avec sa hiérarchie, l'éducateur doit faire preuve de pragmatisme, de diplomatie et surtout d'un sens aigu de la communication en sensibilisant la direction au bienfondé de sa démarche.
Le métier d'éducateur en maternelle s'articule autour du fameux référentiel de 19 compétences. Pour que la pédagogie Montessori remporte l'adhésion de la direction et de l'inspection du travail, elle doit s'intégrer dans ce référentiel. En somme, la pédagogie Montessori à l'école maternelle classique ne doit pas structurer le quotidien en classe. Elle doit être intégrée à petite dose, toujours en vue d'atteindre les objectifs de l'Education nationale.